C’est la semaine Rois, présidents et Khans, où nous allons étudier des leaders de différent types. Il pourrait être amusant de jeter un coup d’œil sur certains des leaders du passé de Magic, et d’explorer des aspects de la création de leurs cartes (plus un leader qui n'en a pas eu).

Chicken a la King | Illustration par Mark Zug

Chicken à la King (Unglued)

Quand la création de Unglued a commencé, l’extension n’avait pas de mécaniques thématiques. Elle allait être à bords argentés, et ne serait pas jouée en tournoi. Son ambiance allait être drôle et un peu absurde, et elle allait faire ce que le bord noir ne pouvait simplement pas faire mécaniquement, mais elle n’avait pas de thème reliant le tout. À mi-chemin de la création, je me suis rendu compte qu’un petit thème de poulet se profilait. J’avais quelques créatures qui étaient des poulets et quelques-uns des concepts de carte préliminaires en contenaient dans les illustrations. Et bien voilà, me suis-je dit, Unglued pouvait avoir un thème, et Poulets n’était pas pire qu’un autre.

Je me suis même fait intercepter un jour dans le couloir par le directeur de la conception, un gars du nom de Joel Mick, qui m’a demandé « Est-ce que c’est drôle, les poulets ? ». J’ai ensuite dû lui expliquer la longue histoire des poulets dans la comédie et les sketches, en avançant des exemples comme le poulet en caoutchouc. Joel est reparti rassuré.

Une partie du thème était donc de faire un cycle de poulets. Cependant, l’un d’entre eux devait être leur seigneur pour que les joueurs puissent construire un deck de poulet. (Si je l‘avais fait aujourd’hui, j’aurais concentré plus de poulets dans quelques couleurs pour faciliter la construction d’un deck Poulet, mais c’était mes premières années et je n’avais pas encore tout à fait saisi ce principe.) Un jour à la maison, je parlais à Laura—ma femme—qui était à l’époque ma copine, de la nécessité de trouver un leader pour les poulets. Elle a trouvé le nom Chicken à la King (Poulet royal) et je me rappelle avoir dit « C’est maintenant le nom de la carte ».

Il s’est avéré qu’un autre thème important de l’extension était les lancers de dés (plus particulièrement ceux à six faces), et trois des quatre autres poulets en utilisaient. J’ai donc décidé de relier le Chicken à la King au lancer de dé. Cela permettait à la carte de trouver sa place dans un deck à thème Poulet, un deck à thème de lancer de dé ou encore—et c’est mon favori—un deck à la fois Poulet et dés.

Au départ, la carte ne mettait les marqueurs +1/+1 sur les poulets qu'en faisant 6 au dé. Je me suis rendu compte qu’il fallait un moyen pour que cette carte fonctionne aussi toute seule, et j’ai donc rajouté la capacité d’engager un poulet pour lancer un dé. Comme ça, cette carte pourrait être utilisée même sans sa basse-cour.

J’ai passé pas mal de temps sur le texte d’ambiance. Je voulais vraiment saisir l’essence-même que ce roi des poulets était le leader de son peuple, tout en faisant ressortir qu’il était aussi un poulet. J’ai été très satisfait de mon texte d’ambiance qui sonnait bien, donnait un peu de background aux poulets, et offrait une boutade qu'on mettait un moment à comprendre (« Lors de la révolution des poulets, le roi n'a pas perdu la tête, contrairement à sa basse-cour– qui courait en rond. »)

Et c’est comme ça que le seigneur des poulets a vu le jour.

King Suleiman | Illustration par Mark Poole

King Suleiman (Arabian Nights)

Innistradavait un certain nombre de cycles dans chaque couleur excepté le blanc pour représenter les monstres qui assiégeaient les humains de tous les côtés. Il est intéressant de noter qu’Innistrad n'est pas la première extension de Magic à faire un cycle dans quatre des cinq couleurs. Cette distinction revient à la toute première extension de Magic, Arabian Nights. Richard Garfield y avait fait deux cycles—un de djinns et un autre d’éfrits. Les deux avaient une carte en bleu, noir, rouge et vert. Puis, pour contrebalancer ce cycle, il avait créé King Suleiman, une créature qui pouvait être engagée pour détruire un djinn ou un éfrit. Dans ces premiers jours, le blanc était un peu plus proactif pour tuer ce qu’il considérait comme « méchant ».

King Suleiman est inspiré du roi Salomon biblique. Dans les histoires, Salomon a reçu un anneau magique fait de cuivre et de fer lui permettant de soumettre un djinn mythique. Le djinn a ensuite volé l’anneau pendant que Salomon prenait un bain, mais celui-ci a pu regagner son anneau et contrôler à nouveau le djinn avant de finir par l’emprisonner dans une bouteille. Cet événement est représenté sur une deuxième carte dans Arabian Nights, la Bouteille de Salomon, qui vous permettait d’invoquer un djinn ou alors vous faisait perdre 5 points de vie.

L’écriture de King Suleiman venait probablement de Soliman le Magnifique, le dixième sultan de la dynastie ottomane et celui qui a régné le plus longtemps, de 1520 à 1566. Sous sa tutelle, l’Empire ottoman entra dans l’age d’or de son développement culturel. (Merci Wikipedia.)

Olivia Voldaren | Illustration par Eric Deschamps

Olivia Voldaren (Innistrad)

J'ai créé cette carte parce que je trouvais important que les vampires aient leur propre leader. J’ai commencé une des réunions de création en écrivant « Comte Dracula » sur le tableau. « Aujourd’hui, nous allons créer le seigneur des vampires. »

Nous avons passé quelque temps à parler de ce que le seigneur des vampires devait faire. L’équipe de création aimait l’idée que la créature se nourrisse d’autres créatures en les tuant ou en les transformant en vampire. L’élément difficile était par contre de trouver comment l’implémenter d’un point de vue mécanique. Nous avons finalement eu l’idée de représenter le fait de se nourrir en infligeant des blessures à la victime et en rendant le Comte Dracula plus fort. Et si cette capacité avait une composante supplémentaire ? Si, en plus des blessures, elle transformait la victime en vampire ?

De cette façon, vous pouvez tuer une créature en vous nourrissant d’elle, ou alors vous pouvez montrer un peu plus de retenue et la transformer en vampire. La question suivante était : pourquoi le faire ? Entre-temps, nous avons joué avec l’idée que la créature devait avoir deux capacités, une rouge et l’autre noire (car les vampires du bloc Innistrad étaient noir et rouge). Traditionnellement, l’alimentation est faite en noir (surtout parce que les vampires sont noirs), mais comme vous infligez en gros des blessures directes, nous avons placé la capacité en rouge. Ceci voulait dire que la capacité noire devait être quelque chose que le noir savait faire.

En jouant avec l’ambiance, c'est devenu clair. Le seigneur des vampires devait avoir la possibilité d’attirer d’autres vampires dans votre camp. Normalement, la couleur du vol de créature était le bleu, ainsi que le rouge qui dérobait avec une limite de temps en temps, bien que le noir reçoive aussi le vol de créatures en de rares occasions. Cette carte était supposée être très visible dans le jeu. Si le noir ne pouvait avoir cette capacité que dans les cas spéciaux, c'était bien le cas ici. La deuxième capacité était plein d’ambiance et offrait une excellente synergie avec la première. Nous avions trouvé notre Comte Dracula.

Mais l’histoire ne finit pas là. Alors que j’étais un grand fan de la carte, Mark Gottlieb, qui était toujours le directeur des règles à ce moment-là (il a quitté ce poste vers la fin du développement d’Innistrad ) n’en aimait pas vraiment la réalisation. Il n’aimait pas le problème de mémoire survenant lors des transformations de créatures en vampires, et il trouvait que voler des créatures constamment, ce serait un peu trop. Nos discussions à ce sujet ont été sans fin. Le fichier de création a été rendu avec ma version, et une fois qu’il a été dans les mains du développement, un sondage de rares a été effectué. C'est un outil utilisé par l’équipe de développement, où nous montrons des cartes rares et rares mythiques d’une extension à des joueurs Magic partout chez Wizards, pour récolter leurs premières impressions. Comte Dracula a gagné le sondage des rares. Cela m’a convaincu que j’avais fait le bon choix.

Quand nous l’avons appelé Comte Dracula, nous savions déjà que ce nom allait changer. Je l’avais juste utilisé pour m’assurer que tout le monde comprenne bien ce que l’on recherchait. L’équipe créa a ensuite eu l’excellente idée de changer le sexe de cette référence. Pourquoi ne pas faire du seigneur des vampires d’Innistrad une femme ? Et c’est ainsi qu’est née Olivia Voldaren.

Oona, reine des færies | Illustration par Adam Rex

Oona, reine des færies (Sombrelande)

Les cartes hybrides sont difficiles à créer. Les cartes hybrides bleu-noir sont très, très difficiles à créer. Pourquoi ? Parce qu'elles se situent dans l’espace où deux couleurs se chevauchent d’un point de vue mécanique. Des dix paires de couleur du jeu, quelles sont celles qui se chevauchent le moins ? Bleu-rouge et bleu-noir. La création de cette carte était donc un vrai défi.

Le peuple fée apparaissait dans Lorwyn en bleu et noir, et c’était de vraies petites pestes. Puis, la Grande Aurore est venue et tout a changé. Enfin, presque tout. Le peuple fée était toujours bleu et noir, et c’était toujours de vraies petites pestes. Oona était leur reine. Tout au long de l’année, elle allait apparaître dans l’histoire et nous savions donc que sa carte allait en intéresser plus d’un.

Nous devions donc bien saisir l’ambiance de la reine des færies, et il nous fallait le faire en utilisant une carte hybride bleu-noir. Pourquoi devait-elle être hybride ? Parce que Sombrelande était L’EXTENSION HYBRIDE, dans laquelle la moitié des cartes étaient hybrides. Pour cette raison, nous voulions que la plupart des cartes phares—surtout la plupart de celles des créatures légendaires—soient hybrides. De plus, le peuple fée était bleu et noir, et nous voulions que leur leader soit jouable avec chacune des deux couleurs.

Nous avons commencé en sachant qu’elle devait savoir voler. La grande majorité du peuple fée volait et nous voulions que la reine des færies fasse de même. Le bleu et le noir ont tous deux le vol. Nous avions ensuite décidé que Oona devait être capable de créer des créatures Peuple fée. Toutes les couleurs savent faire des jetons et le chevauchement ne posait donc pas de problème. Comme les jetons allaient être Peuple fée—en fait « peuple fée et gredin » au bout du compte—nous avons décidé de leur donner le vol. Nous les avons faits bleu-noir car la couleur était importante dans le bloc Sombrelande, et ils étaient créés par Oona, qui était elle-même bleu-noir.

Un des rares domaines où bleu et noir se chevauchent est la « meule » (c’est à dire lorsqu’on pose des cartes directement de la bibliothèque dans le cimetière). D’habitude, le bleu meule le dessus de la bibliothèque et le noir y cherche des cartes spécifiques, mais chaque couleur est secondaire dans l’effet primaire de l’autre couleur. Au départ, nous avions envisagé deux capacités, une faisant des jetons et l’autre qui meulait, mais cela semblait simplement trop déconnecté. Et si on combinait les deux ? Y avait-il un moyen de faire aboutir la meule en jetons de peuple fée ?

Cela nous a amené à l’idée de meuler l’adversaire, puis de trouver un critère qui nous permettrait de déterminer quand nous allions recevoir des jetons. Sombrelande avait un thème « les couleurs, c’est important » et le choix d’une couleur semblait donc coller. La décision finale était de mettre X dans le coût d’activation pour que le contrôleur de Oona puisse meuler de plus en plus de cartes pour faire de plus en plus de créatures Peuple fée tout au long de la partie. Oona est devenue un Commandant très populaire. Je suis donc content qu’on ait réussi à résoudre cette création complexe d’une façon aussi satisfaisante.

Sidar Kondo (Vanguard)

Je raconte tout le temps des histoires de cartes qui ont été faites mais je ne parle pas souvent de celles qui n’ont pas vu le jour. Sidar Kondo était un leader d’une tribu de Djamuraa. Cependant, il est probablement surtout connu comme le père de deux garçons, un biologique et l’autre adopté. Son fils biologique était Vuel, mais vous le connaissez peut-être mieux sous le nom qu’il a pris en voyageant sur Rajh : Vuel de Rajh ou Wöhlrajh. Wöhlrajh était le grand méchant au début de l’épopée de l’Aquilon, et il était un des personnages principaux du bloc Tempête.

Le fils adoptif de Sidar Kondo était Gerrard, le héros de l’épopée de l’Aquilon. Gerrard était destiné à accomplir une grande prophétie, et pour le protéger de ceux qui lui voudraient du mal, il a été envoyé encore bébé chez Sidar Kondo. Celui-ci n’était pas un personnage majeur mais il était suffisamment important à l’époque à laquelle nous travaillions sur Vanguard pour qu’on fasse une carte pour lui. Cependant, cette histoire ne parle pas de cette carte, elle parle de la carte de créature légendaire que j’ai faite pour Spirale temporelle.

Le thème de Spirale temporelle portait sur le voyage dans le passé avec un fort élément nostalgique. Nous nous sommes spécialement concentrés sur la création de créatures légendaires à partir de personnages dont nous n’avions jamais pu faire des cartes. La plupart des personnages de l’Aquilon avaient une carte, et j’ai donc cherché lequel manquait. Sidar Kondo semblait un bon choix. C’était la seule carte de Vanguard (qui couvre la première partie de l’épopée de l’Aquilon—c’est à dire les trois premières extensions) qui n’avait pas une carte de créature légendaire.

Je l’ai créée et puis l’équipe de créa a ensuite décidé de ne pas l’inclure. Il faut dire que l’extension comptait des personnages majeurs tels que Mishra et Téfeiri ainsi que quelques favoris des fans comme Jaya Ballard, mais elle contenait aussi plusieurs personnages mineurs comme Ith, Ib Micœur et Mangara. J’ai même réussi à personnellement inclure aussi bien Saffi Eriksdotter que Norin le circonspect dans l’extension, alors qu’ils étaient tous deux basés sur des textes d’ambiance. La créa a eu juste l’impression que Kondo n’était pas assez connu. J’ai fait remarquer qu’il était une carte de Vanguard, mais sans succès. Et c’est ainsi que Sidar Kondo n’est jamais devenu une créature légendaire.

Peut-être un de ces jours…

Reine des slivoïdes | Illustration par Ron Spencer

Reine des slivoïdes (Forteresse)

La Reine des slivoïdes a l’honneur d’être la toute première carte de Magic à cinq couleurs. (D’accord, la première carte à cinq couleurs « imprimée et disponible en booster ». Techniquement, nous avons fait la carte du Champion du Monde 1996, mais il n’y en a eu qu’une seule.) Elle est aussi leader d’une des races les plus populaires de Magic, les slivoïdes. Voici comment elle a vu le jour.

Les slivoïdes ont été créés au départ dans une extension du nom de « Astral Ways », faite maison par Mike Elliott. Plus tard, il allait joindre l’équipe de R&D et devenir un des créateurs les plus prolifiques (juste après moi, Mike tient toujours le record du plus grand nombre de postes de responsable de conception.) Mike et moi avons joint le R&D en tant que développeurs mais nous avions tous deux envie de devenir des créateurs. Avec l’aide de Richard Garfield, j’ai pu récupérer le poste de directeur de conception pour l’extension Tempête. J’ai sélectionné mon équipe, dont Mike, sachant qu’il avait hâte de faire de la création.

Quand Mike a été engagé, le R&D lui a acheté l’extension « Astral Ways », et il en a donc soumis de nombreuses cartes pour la création de Tempête. Une série de créatures était appelée les slivoïdes, et ils représentaient des morceaux d’un seul personnage (une sorte de dieu si je me rappelle bien) qui était tombé sur terre depuis les cieux et qui avait éclaté en mille morceaux. Les noms d’origine des slivoïdes étaient tous des morceaux du corps de cette créature. Le plus impressionnant représentait le cerveau :

Mind of the Controller (rare)

WUBRGT

Invoquer légende

Or

7/7

Piétinement

Tous les slivoïdes gagnent +1/+1

D’un point de vue mécanique, les slivoïdes ont été inspirés par la carte Rats de la peste d’Alpha. Mike aimait la façon dont cette carte se jouait, et avait créé une race de créatures qui auraient toutes un effet similaire, sauf qu’au lieu d’une seule créature, il y en aurait toute une espèce. Nous avons joué avec les slivoïdes et rapidement réalisé que nous tenions là un succès garanti. Le problème était que Mike en avait tellement qu’il nous fallait les répartir.

Pendant que la création suivait son chemin, j'ai travaillé parallèlement avec un gars du nom de Michael Ryan pour assembler l’épopée de l’Aquilon. Michael trouvait que le jeu manquait d’une histoire plus grandiose. C’est pourquoi nous avons créé un groupe de personnages et un scénario qui se développerait sur de nombreuses années. Alors que nous travaillions sur le scénario de Tempête, Michael et moi savions qu’il nous fallait trouver comment y intégrer les slivoïdes.

Nous en avons finalement fait une race étrangère d’un autre plan (encore inconnu à ce jour—peut-être le découvrirons-nous un jour). Wöhlrajh, le méchant de l’histoire, les a découvertes et les a ramenées sur Rajh pour les étudier. Tout comme Wöhlrajh, ces créatures sont des changeformes, et elles partagent une conscience collective. Tant qu’elles sont assez proches les unes des autres, elles peuvent partager leurs pensées. Par exemple, si un slivoïde sait comment former une paire d’ailes, chaque autre slivoïde dans les environs le sait également et peut donc voler. Le Slivoïde métallique de Tempête était d’ailleurs construit par Wöhlrajh pour espionner les slivoïdes. C’est pourquoi il est le seul à ne pas recevoir ou contribuer une quelconque capacité.

Nous avions fait le choix de repousser le slivoïde à cinq couleurs à Forteresse, la deuxième extension du bloc. Michael et moi savions que la toute première créature légendaire à cinq couleurs devait être très spéciale. Tout comme Mike en avait fait le cerveau du groupe, Michael et moi avions réalisé qu’il devait être leur leader. Les créatures partageaient une conscience collective, et nous avons donc suivi ce fil rouge et modelé la Reine des slivoïdes d’après une reine abeille. Elle donnait naissance aux slivoïdes (tout du moins cette génération—bien que cela ne soit pas expliqué dans l’histoire, Wöhlrajh avait capturé la Reine des slivoïdes et elle est l’origine de tous les slivoïdes de Rajh).

Voici la carte comme elle apparaissait dans la création de Forteresse :

Mind of the Controller

WUBRG

Invoquer légende

Or

7/7

Piétinement

Compte comme slivoïde

3 : Mettez un jeton slivoïde en jeu. Utilisez cette créature comme créature 1/1 incolore.

Je ne me rappelle pas si la mécanique de production de slivoïdes a été d’abord créée par Mike puis reflétée dans l’histoire, ou si l’histoire nous a inspiré à modifier la création (je pense que c’était la mécanique d'abord), mais au bout du compte nous avons fait de la Reine des slivoïdes une créatrice de slivoïdes.

Dans l’histoire, quand Wöhlrajh capture l’Héritage (à travers Grévën il-Vec, son homme de main)—la collection d’objets magiques dont Gerrard a besoin pour accomplir son destin—il la place sous la protection de la Reine des slivoïdes. Karn finit par trouver la Reine des slivoïdes et lui explique que l’Héritage est pour lui ce que les slivoïdes sont pour elle (Karn est le gardien de l’Héritage, tout en faisant partie de celui-ci), et elle le lui laisse.

La carte dit « La Reine des slivoïdes compte comme slivoïde », car à l’époque les créatures ne pouvaient avoir qu’un seul type de créature, et que « légende » était un type de créature et pas encore le super-type « légendaire ». Le piétinement a été retiré lors du développement car il s’était avéré un peu trop puissant. De plus, le but de la Reine des slivoïdes n’était pas de l’utiliser pour assommer l'adversaire, mais de lui faire faire des tonnes et des tonnes de slivoïdes.

La Reine des slivoïdes est devenue un éternel favori des fans et a inspiré de nombreux seigneurs slivoïdes à cinq couleurs. Pour en savoir plus sur l’histoire des slivoïdes, vous pouvez lire mon article de la Semaine slivoïde (« Sliver Me Timbers »qui remonte à loin, en 2004).

Sol'kanar the Swamp King | Illustration par Richard Kane Ferguson

Sol'kanar the Swamp King (Legends)

Je vais conclure aujourd’hui avec une de mes histoires préférées de tests de jeu de tous les temps. C’était un test de jeu de Spirale temporelle et je jouais contre Devin Low, un ancien développeur de Magic. À l’époque, nous avions une mécanique qui permettait d’engager certaines cartes deux fois. Voici comment cela fonctionnait. Une créature avec le symbole de double-engagement pouvait être engagée deux fois pendant le même tour. La première fois, on l’engageait normalement en la faisant pivoter de quatre-vingt-dix degrés. On pouvait ensuite l’engager à nouveau en la tournant quatre-vingt-dix degrés de plus, lui faisant faire en tout un demi-tour. Les créatures ne se dégageaient que d’une rotation normale lors du dégagement. Si on l’avait donc engagée deux fois, il fallait deux tours pour la dégager complètement. Il fallait naturellement pour cela user de capacités pour lesquelles il y avait un avantage à les engager deux fois lors du même tour.

Une de ces cartes était une créature noire qui s’engageait pour faire en gros ce que fait la Thérapie de la Coterie : vous nommez une carte non-terrain, l’adversaire révèle sa main et se défausse de toutes les copies de la carte nommée. Comme l’adversaire vous montrait sa main, le deuxième engagement était très apprécié car vous saviez justement ce qu’il avait en main. Ceci faisait du premier engagement une Thérapie de la Coterie et du deuxième une Coercition, et une qui pouvait toucher plusieurs copies de la même carte.

Une petite annotation. Cette mécanique n’a évidemment pas été utilisée dans l’extension. Bien qu’elle soit innovante, il s’est avéré difficile de l’utiliser en création et la structure de jeu était finalement assez ennuyeuse—Les joueurs l’engageaient deux fois le premier tour, puis ne l’engageaient qu’une seule fois durant tout le reste du jeu

Mais revenons à l’histoire : le jeu était déjà avancé et il était clair que Devin préparait un grand coup. Il n’avait que deux cartes en main, et en a utilisé une pour chercher deux terrains dans sa bibliothèque et les mettre en jeu engagés. (Je pense que cette carte n’a pas non plus été sélectionnée—ah, les joies du test de jeu.). Devin a ensuite laissé entendre que j’allais avoir de gros problèmes au tour suivant.

J’ai donc joué la créature noire à double-engagement. J’avais un moyen de lui fournir la célérité pour pouvoir l’engager tout de suite. Rappelez-vous que, pour le premier engagement, je ne pouvais que deviner une carte au hasard. Devin ne possédait qu’une seule menace, et j’avais uniquement joué le premier engagement pour pouvoir voir sa main et pouvoir nommer la menace lors du deuxième engagement.

Pour ceux qui ne connaissent pas Spirale temporelle, sachez que c’était une méga-extension. Ce n’était pas seulement une grande extension, mais à l’époque nos grandes extensions étaient encore plus grandes qu’aujourd’hui. De plus, Spirale temporelle avait ce qu’on appelait une liste déplacée dans le temps, c’est-à-dire 121 cartes du passé de Magic. Aaron Forsythe faisait partie de l’équipe de création. Il avait comme mission d’assembler la liste déplacée dans le temps, et elle changeait sans arrêt de test en test. Je n’avais donc aucune idée de ce qui s’y trouvait. Avec une grande extension principale et une liste décalée dans le temps qui changeait tout le temps, il y avait donc un nombre énorme de possibilités de cartes. En gros, cela aurait pu être n’importe quelle carte de Magic jamais publiée.

Grâce au double-engagement, la première estimation n’avait heureusement pas d’importance. Alors quand Devin m’a demandé « Quel est ta supposition ? » , j'ai seulement plaisanté. « Je ne sais pas, disais-je, peut-être « Sol'kanar the Swamp King »—que j’avais choisi avant tout parce que le nom de la carte est rigolo. La dernière fois que j’avais vérifié, il n’était même pas dans la liste décalée dans le temps, mais c’était sans importance parce que je plaisantais.

Devin m’a jeté un regard surpris et a dit « Tu m’as eu ! » Il a ensuite défaussé Sol'kanar the Swamp King. À mon avis, c’était la plus proche approximation de ce qu’on appelle au golf un trou en un seul coup dans Magic, et j’ai donc fait une petite danse de victoire autour de la salle.

C’est cette histoire à laquelle je pense à chaque fois que je vois Sol'kanar the Swamp King.

Président à l'appel

C’est tout pour aujourd’hui. J’espère que cette balade chez certains des plus grands leaders du jeu vous a plu. Comme toujours, j’apprécie votre feedback Vous pouvez m’écrire par mon email ou par n’importe lequel de mes médias sociaux (Twitter, Tumblr, Google+ ou Instagram).

Rejoignez-moi la semaine prochaine où nous allons enfin conclure nos semaines à thème de clans de Tarkir avec les Temur.

D’ici-là, je vous souhaite de trouver une raison de faire une danse de victoire autour de votre propre séjour.

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