Comment construire une courbe de mana
Dans Magic vos cartes ont des coûts de mana et vous ne pouvez jouer qu’un terrain par tour pour contribuer à les lancer (c’est clairement un conseil mystérieux de niveau expert pour vous !).
Des cartes exigeant plus de mana ont généralement des effets plus extrêmes sur la partie. Pour un mana vous pouvez par exemple lancer un Expert lamefeu, mais quand vous arrivez à cinq manas vous pouvez lancer les Jumeaux au cœur pur beaucoup plus féroces.
La signification en est simple : si à chaque tour du jeu vous pouvez lancer une carte dont le coût correspond au nombre de terrains que vous avez sur le champ de bataille, alors vous allez jouer la carte la plus puissante possible à chaque tour. Les parties qui se déroulent ainsi sont très rares (et parfois il est juste d’en dévier) mais il est important de mettre autant que possible les chances de votre côté.
Notez que cela peut diverger un peu dans des formats Construits comme le Standard ou le Modern. Parfois il est beaucoup plus avantageux de lâcher un barrage d’excellentes cartes à un mana ou de jouer un deck Contrôle qui a l’air de ne rien vouloir lancer les premiers tours, puis d’écraser l’adversaire avec de puissants sorts d’anti-créature et des menaces géantes (par là je ne veux certainement pas sous-entendre que la courbe n’est pas un facteur majeur des decks en Construit – elle l’est sans aucun doute – mais dans les formats Construit on rencontre plus d’exceptions à la règle).
En Limité, ce type de déroulement de jeu est votre pain quotidien — l’approche que la plupart des decks essayent d’emprunter pour avoir du succès. Comment pouvez-vous construire un deck qui vous donne la meilleure chance d’optimiser vos terrains à chaque tour de la partie ?
Je vous présente : la courbe de mana.
La courbe de mana, c’est que vous disposez de, comment dire . . . d’une courbe de coûts de mana. Vous piochez plus de cartes au fur et à mesure de la partie, et cela signifie que vous avez généralement besoin de plus d’exemplaires de cartes à coût réduit et moins d’exemplaires de cartes à coût plus élevé.
Cela veut dire qu’en construction de deck vous allez vouloir jouer les cartes qui correspondent le mieux à votre courbe — et supprimer des cartes en conséquence. Par exemple, si vous supprimez toutes vos créatures à deux manas mais que vous jouez six créatures à quatre manas, alors vous avez probablement une courbe de mana peu efficace. Il est très probable que vous devriez supprimer quelques-unes de vos quatre au profit de vos deux.
J’ai vu plus de parties en Limité remportées simplement en restant sur la courbe, avec les bonnes poses de terrain entre les tours deux à cinq, que de parties remportées avec n’importe quelle autre méthode. Si vous réussissez vos poses de terrain à chaque tour et que votre adversaire trébuche, alors il va rapidement se retrouver à la traîne.
C’est une excellente méthode pour commencer à construire n’importe quel deck. Aujourd’hui nous allons surtout examiner le Limité mais, comme je viens de le mentionner, c’est également un excellent moyen pour construire un deck en format Construit (surtout s’il est agressif).
Alors, comment vous y prendre pour construire votre courbe de mana ? Voici plusieurs conseils pour le faire en Limité.
1. Les sorts non-créature (pour la plupart) sous les créatures
La manière générale pour établir une courbe de mana est de gauche à droite avec une pile pour chaque coût converti de mana, le coût le moins élevé à gauche. Puis, vous placez les piles de coûts en ordre ascendant vers la droite jusqu’au coût converti de mana le plus élevé (à moins d’être Ken Nagle et dans ce cas-là, vous le faites de droite à gauche).
Il y a cependant une distinction importante à faire ici : vous devez déterminer ce que vous allez vouloir lancer à chaque coût de mana, plutôt que ce que vous pouvez lancer à chaque coût de mana.
Voyons par exemple la Faiblesse en mue.
Elle coûte un mana . . . mais ce n’est certainement pas une carte que vous allez jouer au premier tour ! Dire qu’elle remplit votre quota de cartes à un mana est certainement faux.
Vous devriez donc séparer vos cartes en fonction de votre désir de les jouer dès le tour où vous disposerez d’assez de mana. Mettez celles que vous voudrez jouer ce tour-là dans une rangée, et vos autres cartes — en général des sorts non-créature — que vous ne voudrez pas jouer ce tour-ci, dans une rangée en dessous. Cela place en général les créatures en haut — mais pas toujours. Prenez par exemple le Don du Luxa.
C’est une carte que je vais vouloir jouer si possible au tour quatre. Elle devrait donc aller dans la rangée du dessus car je vais vouloir la lancer ce tour-là. Vous devriez vous retrouver avec quelque chose qui ressemble à cela :
Vous allez malgré tout vouloir aligner les sorts que vous ne voulez pas lancer sur la courbe, car c’est une information importante (par exemple, savoir que tous vos sorts d’anti-créature coûtent quatre manas pourrait être très instructif pour votre courbe de créatures). Mais quand il s’agit de savoir ce que vous allez lancer à chaque tour, alors la rangée supérieure des créatures est la plus importante.
2. Placez les cartes là où vous prévoyez de les lancer
Il n’est naturellement pas toujours clair de voir où une carte devrait aller — et Amonkhet complique les choses.
Où placer une carte avec le recyclage ? Et si elle a un déclenchement par recyclage ? Que faire d’une carte avec un X dans son coût ? Que faire si le coût peut être réduit ?
Mon conseil le plus basique est le suivant : placez les cartes sur votre courbe de mana là où vous pensez que vous allez le plus probablement les utiliser.
Par exemple, dans le cas du Glaneur d'os, je le mettrais sur mon emplacement à quatre manas. C’est super si je peux le lancer pour un mana, mais je devrais m’attendre à quatre manas la plupart du temps.
D’un autre côté, je vais certainement recycler Jugé valeureux bien plus souvent que je vais pouvoir le jouer directement. Je mettrais cette carte également dans mon emplacement à quatre manas.
De plus, il y a une grande différence entre ces deux cartes. L’une ne peut pas toujours être lancée pour son coût moins élevé, mais l’autre le peut. Par conséquent, avec quatre manas je peux toujours me servir de Jugé valeureux, mais si je n’ai qu’un mana, alors je ne suis pas toujours sûr de pouvoir utiliser le Glaneur d'os.
Et pour les coûts de recyclage normaux ?
En général je les placerais sur votre courbe de mana en partant du principe que vous les lancerez normalement — puis que vous les recyclerez pendant la partie quand vous serez dans une situation où leur recyclage s’impose. Cela étant dit, si vous insérez des cartes dans votre deck que vous allez lancer de temps en temps, mais que vous prévoyez surtout recycler — par exemple la Délivrance de la dissidente — alors je les placerais dans l’emplacement du recyclage. Placez-les là où vous allez les utiliser le plus souvent.
Et pour la répercussion ?
En ce qui me concerne, c’est assez clairement une carte à trois manas : vous allez vouloir la lancer au tour trois et vous ne pouvez pas lancer l’autre côté de votre main.
Cela étant dit, vous devriez garder à l’esprit qu’avoir six manas libres à un moment donné pourrait vous faire gagner des cartes — mais ce n’est pas pour autant que je placerais cette carte à six manas dans votre courbe de mana. De même, il est important de toujours garder à l’esprit les capacités activées sur vos créatures, car ce sont aussi des façons d’utiliser votre mana.
Voici une carte qui sort de l’ordinaire : où la placeriez-vous ?
Ça a tout l’air d’une question piège.
Ce que j’aime faire avec Interminable, c’est de placer la carte là où je pense qu’elle sera la plus puissante, ce qui est habituellement une 3/3 pour trois manas ou une 4/4 à quatre manas. Je vais bien sûr la lancer, en fonction de la situation, pour n’importe quel prix qui semblera juste — mais c’est utile de savoir où cela serait optimal.
Et utilisez bien sûr votre jugement et gardez vos coûts flexibles à l’esprit. Vous ne pouvez pas avoir le même bout de carton à deux endroits en même temps. Alors si vous avez une carte avec un coût flexible, prenez-en note en déterminant votre courbe de mana.
3. Suivez quelques règles empiriques
Maintenant que vous avez appris tout cela, combien de cartes voulez-vous approximativement pour chaque coût de mana ?
Eh bien Gavin, c’est une excellente question.
Comme remarqué plus haut, vous allez normalement vouloir plus de coûts bon marché et moins de coûts élevés, car avec le temps vous aurez une plus grande probabilité de trouver vos cartes à prix élevé. Chaque deck va varier légèrement, dépendamment de son plan de jeu et bien sûr de ce que vous avez trouvé. Mais si possible, vous allez vouloir quelque chose (dans votre rangée « créatures », non pas votre rangée « sorts ») qui ressemble en gros à ça :
- 1+ mana : 0–2
- 2+ manas : 4-6
- 3+ manas : 3-5
- 4+ manas : 2-4
- 5+ manas : 1–3
- 6+ manas : 0–2
Ou sous forme graphique :
Les lecteurs attentifs remarqueront peut-être que ces chiffres diffèrent légèrement de mes chiffres habituels de Précis d’Avant-première. La raison en est que cet article est plus tourné vers le Paquet scellé et moins vers le Draft (qui est habituellement plus agressif), et parce que vous aurez droit à des mises en garde plus poussées.
Pourquoi chacune de ces entrées ? Voyons ça de plus près.
Les cartes à un mana, bien qu’il s’agisse de ce que vous voudriez avoir au tour un — et théoriquement en plus grand nombre — ont tendance à être faibles et affichent rapidement des rendements décroissants au fil d’une partie. C’est ici qu’on observe la plus grande disparité entre le Limité et le Construit.
Pourquoi ? En Construit vous avez toutes les cartes à un mana les plus puissantes à votre disposition et vous pouvez optimiser votre deck pour les utiliser.
En Limité ? Pas vraiment.
À l’inverse, les cartes à deux manas sont particulièrement importantes. Soit vous voulez attaquer avec les vôtres, soit vous voulez faire un échange avec celles de votre adversaire. Elles conviennent également pour les tours qui ne correspondent pas à la courbe — par exemple, jouer une carte à deux manas et une à trois au tour cinq. Même si votre deck n’est pas fait pour l’attaque, le fait de bloquer avec une créature à deux manas face à un deck agressif vous sauvera bon nombre de points de vie.
La philosophie des cartes à trois manas est semblable à celle des cartes à deux, sauf que celles à trois trouvent un peu moins bien leur place dans les tours qui ne correspondent pas à la courbe, et que vous avez un peu plus de temps pour les piocher.
C’est avec l’emplacement à quatre manas que vous arrivez à un réel tournant, et c’est ici que vous commencez à ne pas vouloir en avoir trop. Bien que vous allez vouloir jouer une carte à quatre manas au tour quatre, vous ne voudrez vraiment pas en avoir trop. Se retrouver avec une main d’ouverture qui contient trois ou quatre cartes à quatre manas, cela peut sérieusement ralentir votre pioche.
Cinq manas, c’est encore plus sévère que quatre. Vous allez devoir réussir votre cinquième pose de terrain — ce qui ne sera pas toujours le cas. En général, je prévois d’atteindre le sommet de ma courbe dans ces parages.
Six manas ou plus signifie que la carte doit être très puissante pour que je veuille la jouer. Un gros piétineur vert, une bombe rare ou quelque chose qui aura un gros impact sur le jeu sont d’excellentes cartes chères — mais je veux réserver ces emplacements pour ce qu’il y a de mieux (et en faire complètement l’impasse si c’est un deck agressif).
Et voici une autre règle importante.
4. En cas de doute, choisissez le moins cher
Il y a des années je parlais à l’un des meilleurs joueurs de Magic Online en Limité de tous les temps, Charles "Aceman" Dupont. Sortant de nulle part, il a proféré avec nonchalance un conseil que j’ai saisi au vol, empoché et commencé à utiliser de suite — et il m’a apporté beaucoup de succès.
Son conseil était simple : « Quand une décision est serrée, jouez la carte moins chère. »
Cela s’applique au draft tout autant qu’à la construction de deck — vous devriez bien sûr drafter en pensant à la courbe — et c’est une excellente remarque.
Vous pouvez toujours lancer une carte à quatre manas quand vous pourriez lancer une carte à cinq, ou une carte à trois quand vous pourriez lancer une carte à quatre. L’inverse n’est clairement pas le cas.
Une façon facile de perdre à Magic est de simplement piocher le mauvais mélange de terrains et de sorts. Et si vous piochez trop peu de terrains, alors vous allez vouloir atténuer cela autant que possible — ne pas pouvoir lancer vos sorts, c’est un gros problème. Faire dévier votre deck vers ce qui est meilleur marché, là où c’est possible, agit dans ce sens et augmente également vos chances de réussir vos jeux en début de partie.
Ce conseil doit uniquement être pris à cœur quand le choix est serré. Je ne supprimerais pas votre Hazoret la Fervente pour une Buteuse minotaure. Mais si la sélection est serrée, alors essayez de choisir le meilleur coût.
5. Savoir céder le passage
Comme avec presque toutes les compétences, vous passez par trois étapes.
La première étape est d’apprendre les règles.
La deuxième étape est de suivre les règles.
La troisième étape est d’apprendre quand il est souhaitable d’enfreindre les règles.
Et dans Magic, eh bien, il y a certainement des moments pour les enfreindre (tout du moins en ce qui concerne les « règles » dans cet article sur la construction de la courbe de mana).
Un exemple courant : quand vous draftez un deck très agressif. Dans ces decks je veux une courbe très basse qui culmine à cinq ou même à quatre manas. Je veux des cartes à deux manas en abondance, et toutes les ruses de combat bon marché que je peux lancer. Dans ce cas je pourrais placer mes ruses bon marché sur ma courbe, car je prévois de les lancer tôt.
Peut-être que je drafte un deck Contrôle et que mes sorts d’anti-créature de début de partie se trouvent dans la rangée du dessus de ma courbe ? Elles s’y trouvent pour m’aider à atteindre mes menaces en cas de partie prolongée. Si je construis un deck Contrôle en Construit, alors je vais m’assurer de placer mes contresorts sur ma courbe de mana car je prévois de les lancer si possible à leurs tours respectifs.
Tout ça pour dire : vous allez croiser des variations très réussies de ce que je viens de vous décrire. Vous pouvez vous-même en tirer avantage. Mais il est tout aussi important de savoir quand s’éloigner de la doctrine, alors maîtrisez les fondamentaux cités ci-dessus, construisez une courbe et apprenez en cours de route les meilleures méthodes pour passer à un autre plan. Dans Magic, il y a toujours largement la place pour l’inventivité.
Juste après le tournant
Maîtriser votre courbe de mana est une compétence complexe — et j’espère que cet article vous a fourni quelques outils. À chaque fois que j’ai un doute, j’essaye de coller à la courbe.
Et avec la conclusion du Pro Tour Amonkhet la semaine dernière, je sais que j’attends avec impatience de sortir et de drafter un peu plus d’Amonkhet. Vous allez pouvoir me retrouver en train de surmener des créatures et de recycler des cartes sur une table de Draft à Seattle. Peut-être nous croiserons-nous.
Vous avez des remarques ou des questions ? Aimeriez-vous voir dans l’avenir un article comme celui-ci mais pour des decks Construit ? Faites-le moi savoir ! Vous pouvez toujours me joindre sur Twitter et Tumblr ou encore m’envoyer un e-mail en anglais à BeyondBasicsMagic@gmail.com.
On se reparle la semaine prochaine, et amusez-vous !