Depuis que le recyclage a fait ses débuts il y a presque 20 ans, une question résonnait dans la tête des joueurs tenant en main cette mécanique. Une question éternelle et persistante qui pouvait décider de la partie.

Si vous avez déjà pu jouer une partie d’Amonkhet, alors peut-être que vous aussi, vous avez déjà ressenti les prémices de cette décision difficile. Quand vous testez votre nouveau deck Standard ou contemplez le tour trois d’une partie en Limité, vous avez peut-être médité sur cette question. Cette question finalement très simple.

"Devrais-je recycler cette carte ?"

Cette question revient à la conscience collective à peu près aussi souvent que le recyclage lui-même. Tout ça pour dire : il est de retour !

Mis à part les ruses utilisant le cimetière et les déclencheurs par recyclage comme le Havre de drakôns, le recyclage tourne plus ou moins autour d’une question centrale : que vais-je préférer tenir en main - cette carte-ci ou une autre carte aléatoire de ma bibliothèque ? C’est la base de la décision que vous prenez ici.

Et comme toute décision dans Magic, elle peut avoir des répercussions considérables.

Je me suis retrouvé des deux côtés, de celui de l’instigateur comme de celui de l'opposant, d’un recyclage — ou d’un non-recyclage — qui a décidé de la partie. Faire partir une grande créature grâce au recyclage en début de partie alors qu’on se retrouve à vraiment en avoir besoin en fin de partie, ou encore refuser d’utiliser le recyclage pour se débarrasser d’une créature puissante et donc rater la pose d’un terrain pour cette raison — voilà deux scénarios tout à fait réalistes. La décision peut s’avérer délicate . . . sans parler du fait qu’elle peut vous hanter quand la carte en question vous nargue depuis le cimetière ou votre main.

À la différence de nombreuses autres capacités dans Magic que vous ne devriez pas hésiter à activer si vous avez le mana supplémentaire nécessaire, le recyclage est différent. Il n’est pas toujours pertinent de recycler une carte simplement parce que vous avez le mana requis et que vous pouvez le faire, même quand c’est « gratuit » à la fin du tour de votre adversaire juste avant votre dégagement.

Avec le temps j’ai constaté qu’il y a quatre questions importantes que vous devriez vous poser pour vous aider à décider de recycler ou non. Les voici :

1. Ai-je besoin de cette carte dans l’immédiat ?

La partie la plus simple et la plus facile à évaluer de la question du recyclage : Avez-vous besoin de cette carte dans l’immédiat ?

Vous jouez un deck Contrôle bleu-noir en Standard, la partie est bien avancée et vous avez neuf terrains à votre disposition. Vous piochez les Bassins fétides.

Dans ce cas, on ne prend pas trop de risques à dire que vous feriez mieux de recycler ces Bassins (et sans tarder — vous allez préférer voir cette nouvelle carte immédiatement plutôt que d’attendre la fin du tour de votre adversaire). Bien qu’un terrain supplémentaire pourrait certainement vous aider à un moment donné — par exemple pour lancer votre Extraction du lendemain pour un mana de plus, ou pour lancer toute une série de sorts dans un même tour — il est très probable que de les transformer en une autre carte de votre bibliothèque sera préférable.

Il y a beaucoup plus de choses à prendre en considération que la situation immédiate, mais c’est un bon début. Dans des situations comme celle-ci, dans lesquelles vous n’avez vraiment pas besoin de l’effet, cela vous offre la réponse sur un plateau. Mais il vous arrivera plus souvent de devoir l’évaluer en prenant en considération ma deuxième question qui est, elle, beaucoup plus difficile.

Et cette question est . . .

2. Aurai-je besoin de cette carte plus tard ?

C’est ici que les choses se corsent.

Utiliser le recyclage à fond signifie généralement de se projeter dans l’avenir — parfois de nombreux tours — et d’essayer de déterminer si oui ou non vous aurez besoin de cette carte. Ce sont toutes ces situations où vous vous retrouvez en Limité au premier tour avec un Berger ailé en main et devez décider si vous allez ou non le recycler. De quoi allez-vous avoir besoin dans cinq tours ?

Examinons un exemple du Standard.

Vous jouez un deck noir-vert centré sur des synergies de contresorts face à unr version du deck Tour dynavolt Temur. Il n’y a pas de permanents non-terrain sur le champ de bataille et vous disposez tous deux de plein de terrains. Votre adversaire n’a pas de carte en main mais dispose de huit marqueurs « énergie ». Vous tenez une carte en main : la Délivrance de la dissidente.

Devriez-vous recycler cette carte ?

Eh bien, en ce moment elle ne fera rien sur la table. Si vous la recyclez, vous pourriez facilement piocher une Carcasse mécanique de verdure et frapper fort.

En revanche, si vous la recyclez, votre adversaire pourrait enchaîner en piochant une Tour dynavolt et commencer à grignoter tout ce que vous jouez, ou encore une Carcasse mécanique torrentielle et commencer à dévorer des gros bouts de votre total de points de vie.

Que faire ?

Eh bien, la première chose que j’examine dans un tel cas, ce sont les particularités de la partie : quel est le total de points de vie de votre adversaire, le vôtre, et qu’avez-vous, vous et votre adversaire, déjà lancé dans cette partie ?

Si le total de points de vie de votre adversaire est très bas, cela signifie qu’il reste probablement moins de tours dans la partie, et que vous allez vouloir aller droit au but. S’il est par exemple à quatre points de vie, alors n’importe quelle créature que vous allez piocher représentera probablement un compte à rebours de un ou deux tours. S’il est à vingt points de vie, alors à moins de piocher une de vos créatures les plus puissantes, cette créature ne pourra pas finir le boulot toute seule (et il restera plein de temps à votre adversaire pour trouver ses artefacts dévastateurs).

Et puis il faut examiner ce qui a déjà été joué. S’il y a déjà trois Tours et deux Carcasses dans le cimetière de votre adversaire, alors ses chances d’en trouver tout de suite une autre sur le dessus de sa bibliothèque sont considérablement moindres que si toutes s’y trouvaient encore cachées.

Dans ce cas, je serais généralement plutôt pour le recyclage. Votre objectif est vraiment de trouver une menace pour vous établir comme l'agresseur. Mais cela peut dépendre de nombreuses variables. Par exemple, si votre adversaire a déjà plusieurs Tours dans le cimetière et qu’il vous reste encore plus de cartes de Délivrance dans votre deck, alors vous pensez peut-être pouvoir les affronter en échange un-pour-un dans une partie longue de sorts d’anti-artefact contre sorts d'anti-artefact.

Imaginons un scénario légèrement différent. Cette fois-ci, votre adversaire n’a pas de marqueurs « énergie » . . . mais il a déjà une Tour dynavolt sur le champ de bataille.

C’est une Tour inactive et il lui faudra donc quelques sorts pour pouvoir agir — mais quand ce sera le cas, elle pourrait bien vous embêter.

Que faites-vous ici ?

Dans ce cas de figure, je me débarrasserais probablement de la Tour. En anticipant trois, quatre, cinq tours ou plus de la partie et en supposant que votre adversaire pioche de manière même vaguement raisonnable, le risque que la Tour causera des problèmes pour votre deck est si élevé que s’en débarrasser va être nettement préférable à creuser une carte de plus.

Et cela nous amène directement à la troisième question.

3. Que vais-je espérer piocher dans mon deck ?

Pendant le bloc Les éclats d’Alara, la dernière fois que le recyclage était présent, une histoire faisait le tour au point de devenir un proto-meme dans les cercles de joueurs de Magic compétitifs.

C’était un Grand Prix en Paquet scellé à Auckland en Nouvelle-Zélande, et un des matchs était déjà bien avancé en milieu de partie. Le joueur qui nous intéresse tenait une seule carte en main : l’énorme créature avec le recyclage appelée Tisseur de jungle.

Il avait six terrains et c’était la fin du tour de son adversaire. La table était assez enlisée, mais une grande créature aurait été suffisante pour débloquer la situation. Et le joueur en question . . . a recyclé son Tisseur de jungle.

La citation qui est restée (prononcée par quelqu’un d’autre) était « Ici, on pourrait piocher n’importe quoi . . . même un autre Tisseur de jungle ! »

Quel est le problème avec ce jeu ?

Il n’y a pas grand-chose que le joueur pourrait espérer de piocher de plus avantageux qu’un Tisseur de jungle !

Bien sûr, il lui faut un terrain de plus pour pouvoir le lancer, mais se débarrasser du Tisseur pour essayer de le trouver va à l’encontre du résultat recherché. Il serait en meilleure posture en piochant pour son tour. Soit il trouve un terrain, ce qui lui permet de lancer le Tisseur, soit il tombe sur un non-terrain, ce qui signifie probablement qu’il pourra faire autre chose.

Dépendamment du deck, on peut imaginer des cas où cela aurait été justifié. Si son deck contenait vraiment de nombreuses bombes rares, peut-être aurait-il été justifié d’accélérer la pioche. Mais la plupart du temps ce n’est pas la bonne chose à faire.

Ce qui nous ramène à la question : qu’espérez-vous piocher ici ?

Avant de décider si je dois ou non recycler une carte, j’aime toujours passer mentalement mon deck en revue pour me demander « Quelles cartes seraient préférables à celle-ci ? ».

Si la réponse est « très peu » ou « aucune », alors il vaudrait mieux garder ce que vous avez déjà en main. Recycler votre terrain double d’Amonkhet pour ensuite rater votre pose de terrain est une mauvaise idée pour de nombreux decks. Si vous avez cinq terrains et un Berger ailé, alors je ne le recyclerais pas pour ne pas être empêché de faire un jeu important au prochain tour.

En revanche, la réponse est parfois clairement « Oui, il y a de nombreuses cartes que je préfèrerais à celle-ci ». Dans ce cas il y a généralement une bonne raison de la recycler. Par exemple, si vous n’avez pas de troisième terrain et que vous avez la Proscription en main, ce serait le moment de considérer de la jeter. Si vous avez déjà aligné vos poses de terrain à venir, alors je serais enclin à la garder.

Et pour conclure nous arrivons à la question finale !

4. Vais-je avoir le temps et le mana de recycler cette carte plus tard ?

Le recyclage n’est pas gratuit. (À moins que vous ayez un enchantement Nouvelles perspectives actif — dans ce cas lâchez-vous !) Vous devez payer le coût du recyclage. Par conséquent, une question importante se profile : « Quand vais-je disposer du mana requis ? »

Vous vous rappelez du scénario mentionné plus haut concernant la décision de recycler ou non le Berger ailé au premier tour ? Voyons ça de plus près.

En plus de tous les autres facteurs en jeu, vous devriez réfléchir au mana nécessaire pour exécuter le recyclage et à quand se présentera la prochaine opportunité de prendre cette décision.

Pour commencer, dans cette situation je passerais d’abord les trois autres questions en revue. Vais-je préférer le Berger dans cet appariement ou y a-t-il une raison pour laquelle une créature 3/3 avec le vol serait plus faible ici qu’à la normale ? Combien de cartes préférables se trouvent dans mon deck — serais-je mieux servi ici avec un terrain ?

Puis, je réfléchirais au temps nécessaire pour recycler cette carte.

En ce qui concerne le Berger, c’est un investissement assez minime : juste un seul mana blanc. Cela signifie qu’en ne le recyclant pas maintenant, je vais pouvoir refaire ce choix durant n’importe quel tour à venir dans lequel il me restera un mana. Cela dépend bien sûr de votre main et à quel point vous devez coller à la courbe (ou si vous avez vraiment besoin de terrains), mais c’est un investissement assez minime à entreprendre à un autre moment.

Le corollaire en est naturellement que vous aurez avancé d’une carte de moins dans votre deck que dans l’autre cas. Même si vous suivez déjà bien la courbe, peut-être y a-t-il une meilleure créature que vous pourriez piocher en avançant d’une carte. Mais c’est le prix que vous payez pour garder la créature 3/3 avec le vol dans votre main — ce qui pourrait être lourd de conséquences si la partie se prolonge.

Cependant, dans des situations où le coût de recyclage est beaucoup plus élevé, comme par exemple trois manas, vos chances d’avoir à nouveau autant de mana à disposition sont beaucoup moins probables. Si à la fin du tour de votre adversaire l’opportunité se présente à vous de recycler les Soleils accablants et que vous n’êtes pas certain d’en avoir l’utilité, alors c’est une raison pour pencher vers le recyclage d’une telle carte.

Recyclez-moi

Il existe également d’autres raisons d’envisager un recyclage. Comme je l’ai mentionné au départ, si vous avez des déclencheurs par recyclage comme le Havre de drakôns, alors un recyclage à chaque fois que cela est possible devient beaucoup plus sensé. Si vous comptez sur votre cimetière d’une façon ou d’une autre, ou que vous disposez d’un sort de réanimation, alors vous allez peut-être vouloir recycler pour y déposer plus de cartes.

En revanche, vous allez peut-être vouloir conserver vos cartes avec le recyclage pour charger des cartes telles que l’ Expert lamefeu ou pour refaire le plein du cimetière de votre deck Délire après que votre adversaire ait exilé des cartes de celui-ci. Il y a toujours des situations exceptionnelles.

Cependant, dans la majorité des cas, ces quatre règles vont vous mettre sur la bonne voie. Allez-y, recyclez !

Avez-vous des questions ou êtes-vous intrigué par un élément de l’article d’aujourd’hui ? Je serais ravi d’en parler avec vous ! Vous pouvez toujours m’envoyer un tweet, me poser une question sur mon Tumblr ou m’envoyer un e-mail (svp en anglais) à BeyondBasicsMagic@gmail.com.

Amusez-vous avec le recyclage et profitez du nouveau format Standard. On se reparle la semaine prochaine !

Gavin
@GavinVerhey
GavInsight